Yulian Tremblay, stagiaire notaire et Michel Beauchamp, notaire émérite

Lors de la séance du 30 mai 2024 l’Assemblée nationale du Québec a adopté à l’unanimité le projet de loi no 56, Loi portant sur la réforme du droit de la famille et instituant le régime d’union parentale (ci-après « projet de loi no 56 »). Ce projet de loi, dont l’entrée en vigueur est prévue le 30 juin 2025[1], apporte des changements importants, dont la création d’un régime d’union parentale.

En vertu de l’alinéa 1 du futur article 521.20 du Code civil du Québec, ce régime d’union parentale s’applique dès que des conjoints de fait deviennent les parents d’un même enfant ou encore, lorsque les parents d’un même enfant deviennent conjoints de fait ou, le redeviennent.

Tout d’abord, il est nécessaire de définir le terme « conjoints de fait » qui s’entend de deux personnes qui font vie commune et qui se présentent publiquement comme un couple et ce, sans égard à la durée de leur vie commune[2]. Il y a présomption de vie commune lorsque les personnes cohabitent et qu’elles sont parents d’un même enfant. La représentation publique est une question de fait qui consiste en une manifestation publique du statut de conjoints de fait, à titre d’exemple, on pourrait penser au fait de déclarer le nom de son conjoint- sa conjointe à sa déclaration d’impôts[3]. En résumé, lorsque deux personnes cohabitent ensemble, qu’elles sont publiquement reconnues comme conjoints de fait et qu’elles sont les parents d’un même enfant et, ce peu importe la durée de leur union, elles sont considérées comme étant dans une union parentale et, sont soumises aux devoirs et obligations qui s’y rattachent.

Suivons l’histoire de Manon et Jules afin d’illustrer la formation de ce régime d’union parentale. Ces derniers se sont rencontrés au début du mois de mai 2024. Lors de leur rencontre, Manon habitait encore chez ses parents tandis que Jules était en colocation avec des amis. Manon tombe enceinte et donne naissance à leur enfant neuf mois plus tard. À ce stade, ils ne sont pas conjoints d’union parentale puisqu’ils ne peuvent pas être considérés comme conjoints de fait, ne respectant pas les conditions de vie commune et de représentation publique.

Cependant, l’histoire se poursuit et, les deux tourtereaux décident de d’emménager ensemble en juillet 2025 puisque les circonstances sont favorables. Entre-temps, Jules, ayant souscrit à une petite assurance vie, décide de nommer Manon comme bénéficiaire. Manon et Jules sont désormais des conjoints d’union parentale au sens du projet de loi 56 puisqu’ils se conforment à la définition de conjoints de fait et qu’ils sont parents d’un même enfant.

Dans notre prochain blogue, nous traiterons des impacts de ce nouveau régime d’union parentale.

 [1] Assemblée nationale du Québec, « Projet de loi no 56, Loi portant sur la réforme du droit de la famille et instituant le régime d’union parentale », https://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-56-43-1.html

[2] Art. 521.20 al. 4 C.c.Q.

[3] Brigitte LEFEBVRE, « Le traitement juridique des conjoints de fait : deux poids, deux mesures ! », Cours de perfectionnement du notariat, Chambre des notaires du Québec, Éditions Yvon Blais, 2001, p. 245.

Yulian Tremblay, stagiaire notaire et Michel Beauchamp, notaire émérite

Il est essentiel de savoir que les conjoints de fait ne sont pas reconnus par le Code civil du Québec. En effet, ce dernier ne régit que les conjoints mariés ou ceux unis civilement. La création du nouveau régime d’union parentale vise ainsi à encadrer et à protéger les conjoints de fait qui sont parents d’un enfant commun en leur octroyant des droits, devoirs et obligations. C’est donc un début de reconnaissance des conjoints de fait par le Code civil. En quoi consiste ce régime d’union parentale ? Faisons le tour ensemble !

Résidence principale

Tout d’abord, la résidence principale est celle qui est choisie de concert par les conjoints en union parentale, ou à défaut, elle est présumée être la résidence où les membres de la famille habitent lorsqu’ils exercent leurs principales activités[1].

Le Code civil du Québec (ci-après « C.c.Q. ») prévoit certaines mesures de protection de la résidence familiale afin de préserver un environnement familial convenable et, d’éviter qu’un conjoint ne prenne des décisions unilatérales préjudiciant l’autre conjoint. À titre d’exemple, un époux ne peut pas, sans le consentement de son conjoint, aliéner, hypothéquer ou transporter à l’extérieur de la résidence familiale, les meubles qui servent au ménage[2]. Un époux qui est locataire ne peut pas non plus, sans le consentement écrit de l’autre, sous-louer, céder ou mettre fin au bail si le locateur a été avisé que le logement servait de résidence familiale[3]. Finalement, il est également prévu qu’un conjoint qui est propriétaire d’un immeuble dont une partie sert à l’usage de la famille ne puisse, sans l’autorisation de l’autre, le vendre, le donner, le louer ou l’échanger[4]. Ces protections s’appliqueront dès le 30 juin 2025 aux conjoints en union parentale tel que prévu par le futur article 521.24 du Code civil du Québec et subsisteront durant les 120 jours qui suivent la cessation de vie commune. Ces nouvelles dispositions permettront donc d’éviter qu’un conjoint se retrouve sans logement du jour au lendemain, le tout dans l’intérêt premier de l’enfant.

Constitution d’un patrimoine d’union parentale

L’union parentale emporte la création d’un patrimoine d’union parentale constitué de certains biens appartenant aux conjoints de fait sans égard au droit de propriété[5].  En effet, la résidence principale ou les droits qui en confèrent l’usage, les meubles qui la garnissent ou qui l’ornent et les véhicules automobiles qui servent aux déplacements de la famille font partie de ce nouveau patrimoine, à l’exception des biens échus par succession ou par donation[6]. 

Il est toutefois pertinent d’être informé que les conjoints peuvent, sous certaines conditions, modifier la composition de ce patrimoine en cours d’union[7], ou encore, se retirer entièrement d’un commun accord de l’application de ce patrimoine d’union parentale par acte notarié[8].

Les effets de la constitution de ce patrimoine se ressentent à la fin de l’union parentale (séparation ou décès) puisqu’un partage sera effectué. En effet, l’intention générale est que la valeur accumulée du patrimoine d’union parentale, de laquelle sont soustraites les dettes contractées pour l’acquisition, l’amélioration, l’entretien ou la conservation des biens, soit divisée en parts égales entre les conjoints[9].  Cependant, certaines réserves se doivent d’être émises puisque certaines exceptions peuvent être applicables; l’analyse et le calcul doivent se faire selon la situation particulière de chacun. Il sera ainsi primordial de consulter votre notaire qui pourra vous assister dans l’établissement de la valeur partageable résultant de votre union parentale.

Prestation compensatoire

Initialement, la prestation compensatoire est réservée aux couples mariés ou unis civilement, sauf si elle est prévue dans une convention de vie commune entre conjoints de fait. Toutefois, le projet de loi no. 56 élargit son champ d’application et instaure cette prestation aux conjoints en union parentale. En effet, à la fin de l’union parentale, un conjoint peut demander au tribunal qu’il ordonne à l’autre conjoint de lui verser une prestation qui vise à compenser l’apport, en temps ou en biens, qu’il a effectué et qui a permis à l’enrichissement du patrimoine de cet autre conjoint[10]. Afin de trouver application, certaines conditions doivent cependant être respectées. La Cour suprême du Canada établit six critères afin de permettre l’octroi d’une prestation compensation : 1) la preuve de l’apport au patrimoine du conjoint, 2) l’enrichissement du patrimoine du conjoint, 3) le lien de causalité entre l’apport et l’enrichissement, 4) la proportion dans laquelle l’apport a permis l’enrichissement, 5) l’appauvrissement concomitant et, 6) l’absence de justification à l’enrichissement[11]. Bien que la prestation compensatoire soit applicable aux conjoints d’union parentale, encore faudra-t-il qu’un des conjoints soit capable de démontrer les six critères.

Dévolution légale (décès en l’absence de testament)

Tel que mentionné précédemment, le Code civil du Québec ne reconnaît pas le conjoint de fait. De ce fait, en cas de décès sans dispositions testamentaires prévues, il y a application des règles de dévolution légale du Code civil du Québec selon lesquelles la succession est dévolue au conjoint survivant lié par mariage ou union civile et aux parents du défunt[12]. Le projet de loi no 56 prévoit à son sixième article une modification de l’article 653 C.c.Q. afin d’y ajouter le conjoint lié au défunt par union parentale.

À titre d’exemple, reprenons l’histoire de Manon et Jules (que nous suivons dans la partie I – Formation du régime d’union parentale), maintenant conjoints de fait depuis une dizaine d’années, propriétaires d’un condo et parents de deux enfants en bas âge. Ces derniers n’ont pas rédigé de testament, puisqu’ils considèrent qu’il ne s’agit pas d’une importance capitale pour le moment. Cependant, survient un accident et Jules décède sur le coup, le 11 décembre 2024. Selon les règles actuellement en vigueur, n’étant pas mariés, Manon n’est pas héritière malgré qu’elle ait été la personne la plus importante et la conjointe de Jules depuis plus d’une décennie.

À l’inverse, si nous suivons un autre exemple, celui de Maria et Quentin, conjoints de fait depuis quelques années et, futurs parents d’un enfant dont la naissance est prévue en juillet 2025, soit après l’entrée en vigueur du projet de loi 56, les protections accordées par l’union parentale trouveront application. De ce fait, en cas de décès de Jules, si ce dernier n’a pas rédigé de testament, Maria héritera tout de même du tiers de la succession de son conjoint.

Conclusion

 Le nouveau régime d’union parentale, dont l’entrée en vigueur est prévue le 30 juin 2025, met en lumière, pour une toute première fois, les conjoints de fait parents d’un même enfant en leur accordant des droits, devoirs et obligations. En effet, la protection des familles dont les parents ne sont ni mariés ni unis civilement est grandissante puisqu’on remarque une constante diminution du nombre de mariages célébré au Québec depuis 1971 selon l’institut de la statistique du Québec[13]. Voilà, une belle avancée !

 

[1] Futur art. 521.23 C.c.Q.

[2] Art. 401 C.c.Q.

[3] Art. 403 al. 1 C.c.Q.

[4] Art. 404 al. 1 et 405 al. 1 C.c.Q.

[5] Futur art. 521.29 C.c.Q.

[6] Futur art. 521.30 al. 1 et 2 C.c.Q.

[7] Futur art. 521.31 C.c.Q.

[8] Futur art. 521.33 C.c.Q.

[9] Futur art. 521.34 C.c.Q.

[10] Futur art. 521.43 al. 1 C.c.Q.

[11] M. (M.E.) c. L. (P.), 1992, 1 R.C.S. 183, p. 204.

[12] Art. 653 C.c.Q.

[13] Institut de la statistique du Québec, « Le nombre de mariages au Québec en 2023 reste stable », Gouvernement du Québec, https://statistique.quebec.ca/fr/communique/nombre-mariages-2023

Me Joëlle Tremblay, notaire

Nous pouvons penser que lors du décès d’une personne qui avait préparé un testament, tout sera simple. Si la préparation d’un testament bien rédigé facilite grandement la liquidation de la succession au décès, la présence d’un testament irrégulier ou encore mal rédigé peut compliquer la liquidation d'une succession. C’est pourquoi il est important d’être bien conseillé lorsque vous préparez votre testament afin d’éviter des tracas à vos proches à votre décès. Voyons ensemble quelques exemples.  

Vérification du testament 

Le décès d’une personne ayant signé un testament sous une autre forme que notariée implique qu’une vérification de ce testament devra être faite au décès. Il s’agit en fait d’une procédure devant tribunal ou devant notaire et ayant pour but de confirmer que le testament est celui du défunt, d’assurer sa publicité et de confirmer qu’il respecte les conditions de forme prescrites. Il est important de rappeler qu’un testament notarié n’a pas à faire l’objet d’une vérification et qu’il est applicable dès le décès.  

Il faut savoir qu’au Québec, il est possible de tester suivant trois formes de testament, soit le testament notarié, le testament olographe (écrit de la main du testateur) et le testament devant témoins, et ce, suivant le Code civil du Québec. En principe, toute autre forme de testament n’est pas valide. Nous verrons toutefois ci-après qu’il y a des exceptions à ce principe.  

Résultat : confirmation que le testament est celui du défunt, publicité du testament et confirmation que le testament respecte les conditions de forme prescrites.  

Validation du testament sous une autre forme 

Cette procédure est prévue aux articles 713 alinéa 2 et 728 alinéa 2 du Code civil du Québec et trouve application dans le cas où le testateur a eu l’intention de tester selon l’une des formes légales mentionnées ci-avant (appelée « forme apparente »), mais qu’il n’a pas respecté toutes les règles.  

Pour que cette procédure soit admissible, deux conditions doivent être respectées, à savoir :  

1. La nullité du testament doit découler d’un défaut de forme (ex. : signature d’un témoin manquante) et non d’un défaut de fond (ex. : captation du défunt par un membre de sa famille) ;  

2. Le testament doit être acceptable sous une autre forme prévue par le Code civil du Québec (appelée « forme auxiliaire ou subsidiaire »).  

Résultat : le testament ne valant pas sous la forme apparente vaut sous la forme auxiliaire ou subsidiaire. 

Validation judiciaire du testament conforme à la volonté du testateur 

Cette procédure prévue à l’article 714 du Code civil du Québec doit être suivie dans le cas où le testateur a eu l’intention de tester selon l’une des trois formes légales de testament, mais qu’il n’a pas respecté toutes les exigences légales. Cette procédure a encore une fois pour but de respecter la volonté du testateur, puisqu’elle rend valide un testament qui théoriquement, ne l’est pas.  

Quatre conditions doivent être respectées afin de procéder à la validation judiciaire d’un testament, à savoir :  

1. Le testament doit être olographe ou devant témoins, le testament notarié étant exclu de ce type de procédure ;  

2. La nullité du testament doit découler d’un défaut de forme ;  

3. La règle de forme transgressée ne doit pas être essentielle ;  

4. Le testament doit contenir, de façon certaine et non équivoque, les dernières volontés du défunt.  

Il y a beaucoup de jurisprudence concernant la 3e condition afin de déterminer si la règle de forme transgressée est essentielle ou non. Par exemple, dans bien des cas, la signature du testateur d’un testament a été considérée comme essentielle et donc, la validation judiciaire de l’écrit n’était pas possible. Par contre, la jurisprudence est mitigée sur cette question, puisque des testaments ont été validés, même en l’absence de signature du testateur.  

Résultat : le testament ne valant pas sous une forme précise est tout de même validé sous cette forme. 

Reconstitution du testament 

Lorsqu’une personne décède et que son testament ne peut pas être produit (ex. : seulement une photocopie du testament a été trouvée), il est possible de procéder à sa reconstitution, et ce, suivant la procédure prévue à l’article 774 du Code civil du Québec.  

Une condition doit être respectée pour ce type de procédure, à savoir que la preuve du contenu du testament, de son origine et de sa régularité doit être concluante et non équivoque.  

Résultat : le testament est reconstitué et peut donc s’appliquer. 

Reconnaissance du testament 

La reconnaissance d’un testament est également prévue par le Code civil du Québec à son article 773 et son but est de respecter la volonté du testateur. Il ne s’agit pas d’une procédure, contrairement aux autres sujets abordés ci-avant. C'est plutôt lorsqu’une personne reconnait, après le décès du testateur, un testament irrégulier, toujours quant aux conditions de forme, afin qu’il puisse valoir. 

Afin qu’une reconnaissance d’un testament puisse être faite, trois conditions doivent être respectées, à savoir : 

1. La reconnaissance du testament doit émaner d’un héritier ou de tout intéressé ; 

2. La reconnaissance peut être expresse ou tacite (ex. : l’exécution volontaire du testament par une personne) ; 

3. La reconnaissance doit avoir lieu avec la connaissance du vice que la personne pourrait invoquer.  

La 3e condition est très importante, puisque la personne qui reconnait le testament doit être informée de la cause de la nullité et accepter le testament malgré la possible nullité. Le but de cette condition étant qu’une personne ne peut pas renoncer à un droit qu’elle ignore, principe bien connu en droit.  

Résultat : le testament irrégulier est tout de même reconnu par une ou plusieurs personnes. 

Conclusion 

Comme vous pouvez le constater, il existe plusieurs procédures possibles quant à un testament lors du décès d’une personne, sans compter qu’il existe également d’autres procédures autres que celles mentionnées ci-avant qui peuvent s’appliquer, notamment l’obtention d’un jugement déclaratoire, la confirmation d’un testament d’un majeur sous tutelle et l’obtention lettres de vérification).  

Afin de bien analyser votre situation pour déterminer quelle(s) procédure(s) pourrai(ent) s’appliquer à vous ou pour en savoir davantage, communiquez avec notre équipe chez BEAUCHAMP GILBERT NOTAIRES. Communiquez également avec nous si vous désirez préparer votre testament afin de faciliter les démarches légales à votre entourage à votre décès.

Me Michel Beauchamp, notaire émérite

Un conjoint, seul héritier et seul liquidateur, ne peut malheureusement pas démissionner de son rôle de liquidateur pour qu’une autre personne puisse être nommée à sa place, et ce en vertu de l’article 784 du Code civil du Québec.

Solutions possibles :

Le conjoint liquidateur pourrait mandater une autre personne pour le représenter dans le cadre de certains actes. Mais attention, afin de respecter l’article 1337 du Code civil du Québec, il ne doit pas donner des pouvoirs décisionnels au mandataire et transférer l’ensemble de ses pouvoirs de liquidateur.

Le conjoint liquidateur peut aussi mandater un notaire dans la liquidation d’une succession. Ainsi, il demeure quand même liquidateur, mais il se fait assister dans la liquidation, ce qui réduit amplement sa charge, surtout si le conjoint est âgé!

Par contre, il faut apporter une nuance à cette règle, si le liquidateur est héritier unique en vertu d’un testament et que le testateur a prévu un remplaçant ou un mode de remplacement, l’héritier unique pourra démissionner et il sera remplacé par la personne prévue au testament.

Me Michel Beauchamp, notaire émérite

Quand vient le temps de préparer une déclaration de transmission pour un immeuble légué à titre particulier, on peut se demander si l’intervention du légataire particulier est nécessaire et obligatoire. Est-ce que le liquidateur pourrait simplement signer la déclaration de transmission, sans l’intervention du légataire particulier?

En vertu de l’article 742 C.c.Q., le légataire particulier a le droit, comme un successible, de délibérer et d’exercer son option, à l’égard du legs qui lui est fait, avec les mêmes effets et suivant les mêmes règles que le successible. Le légataire particulier pourrait donc, dans les 6 mois du décès, renoncer à son legs particulier. Dans ce contexte, s’il est nécessaire de publier une déclaration de transmission avant l’expiration du délai de délibération, il est obligatoire d’obtenir l’intervention du légataire particulier dans l’acte de déclaration de transmission, à l’effet qu’il accepte son legs. Au-delà de l’expiration du délai de 6 mois, si le légataire particulier n’a pas renoncé à son legs, il est présumé avoir accepté, ce qui permettrait alors au liquidateur de signer seul la déclaration de transmission.

Me Joëlle Tremblay, notaire

La protection des personnes vulnérables occupe une place très importante dans notre société, davantage lorsqu’une personne est en perte d’autonomie et qu’elle doit être déclarée inapte légalement. C’est la raison pour laquelle il existe des mécanismes de protection prévus par la loi et ces mécanismes sont principalement l’homologation du mandat de protection (en présence d’un mandat de protection) et l’ouverture d’une tutelle (en l'absence d’un mandat de protection).

Il est important de faire un léger survol de ce qu’est un mandat de protection. L’article 2166 du Code civil du Québec prévoit ce qui suit :

« Le mandat de protection est celui donné par une personne majeure en prévision de son inaptitude à prendre soin d’elle-même ou à administrer ses biens; il est fait par acte notarié en minute ou devant témoins. Il ne peut être fait conjointement par deux ou plusieurs personnes. »

Plusieurs différences existent entre les deux mécanismes de protection reconnus au Québec, créant d’importantes distinctions quant aux impacts sur l’administration des biens de la personne vulnérable et le consentement à ses soins. Regardons ensemble les principales différences à l’aide du tableau explicatif ci-bas

Homologation d’un mandat de protection

Ouverture d’une tutelle

Représentant légal

Mandataire

Tuteur

Lorsque vous préparez votre mandat de protection, vous nommez des personnes afin qu’elles administrent en votre nom vos biens et consentent en votre nom à vos soins dans le cas où vous deviendrez inapte.

Lorsqu’une personne devient inapte et qu’elle n’a pas signé de mandat de protection, il est nécessaire de lui nommer un tuteur.

 

Le tuteur est proposé dans le cadre de la procédure d’ouverture de tutelle, plus précisément lors de l’assemblée de parents, d’alliés ou d’amis. Par la suite, le tribunal confirme ou non cette nomination lorsqu’il rend son jugement pour l’ouverture de tutelle.

Vous pouvez nommer une seule personne pour agir comme mandataire ou plusieurs personnes en même temps.

Attention : il est possible de nommer deux tuteurs à la personne seulement lorsque les tuteurs sont les père et mère (article 268.1 alinéa 1 du Code civil du Québec).

Vous pouvez nommer une même personne pour agir comme mandataire aux biens (administration des biens) et mandataire à la personne (consentement aux soins) ou des personnes différentes.

Il est possible que soient nommées une même personne pour agir comme tuteur aux biens (administration des biens) et tuteur à la personne (consentement aux soins) ou des personnes différentes.

Il est fortement recommandé de nommer des mandataires remplaçants dans le cas où le mandataire nommé ne peut pas agir (ex. : en cas de décès, de renonciation, d’inaptitude).

Depuis l’entrée en vigueur de la Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité en novembre 2022, il est maintenant possible de nommer un tuteur remplaçant dans le cas où le tuteur nommé ne peut pas agir (ex. : en cas de décès, de renonciation, d’inaptitude).

Fait intéressant : il n’est pas possible de nommer le Curateur public du Québec pour agir comme mandataire.

Fait intéressant : il est possible de nommer le Curateur public du Québec pour agir comme tuteur. Dans ce cas, le Curateur public du Québec ne peut pas refuser cette nomination et devra agir (articles 261 et 266 du Code civil du Québec).

Administration des biens (pouvoirs)

Choix de la pleine administration ou de la simple administration

Imposition de la simple administration

Lorsque vous préparez votre mandat de protection, vous choisissez les pouvoirs d’administration qu’aura votre mandataire.

Le tuteur a les pouvoirs conférés par la simple administration, et ce, suivant l’article 286 du Code civil du Québec, et devra donc obtenir certaines autorisations dans le cadre de l‘administration de vos biens.

Vous pouvez soit choisir la pleine administration et votre mandataire ne sera pas restreint dans ses pouvoirs pour l‘administration de vos biens, soit choisir la simple administration et votre mandataire devra obtenir certaines autorisations dans le cadre de l‘administration de vos biens.

Une situation fréquente suivant laquelle le tuteur doit obtenir une autorisation est la vente d’un immeuble lorsque sa valeur excède 40 000 $. Dans ce cas, le tuteur devra obtenir l’autorisation du tribunal pour aliéner ce bien et l’avis du conseil de tutelle sera également sollicité (article 289.1 du Code civil du Québec).

 Attention : Depuis l’entrée en vigueur de la Loi visant à mieux protéger les personnes en situation de vulnérabilité en novembre 2022, toutes les curatelles (suivant lesquelles le curateur avait les pouvoirs de la pleine administration) sont devenues des tutelles et les tuteurs sous le nouveau régime ont maintenant les pouvoirs de la simple administration.

Mesures de surveillance du tuteur

Reddition de compte

Conseil de tutelle

Il est maintenant obligatoire de prévoir que le mandataire en fonction devra rendre compte de son administration à une personne et la fréquence de cette reddition de compte ne doit pas excéder 3 ans, et ce, suivant l’article 2166.1 alinéa 3 du Code civil du Québec. Il est possible d’inscrire que ce sera le Curateur public du Québec qui devra recevoir la reddition de compte.

Dans le cadre de la procédure d’ouverture de tutelle, plus précisément lors de l’assemblée de parents, d’alliés ou d’amis, un conseil de tutelle est proposé. Le conseil de tutelle a pour rôle de surveiller et conseiller le tuteur. Comme pour le tuteur, le tribunal confirme la composition du conseil de tutelle lorsqu’il rend son jugement pour l’ouverture de tutelle.

 Suivant les articles 228 et 266 du Code civil du Québec, le conseil de tutelle est normalement formé de 3 membres et de 2 membres suppléants, mais il peut être parfois constitué d’une seule dans certaines circonstances (voir les articles 231 et 266 du Code civil du Québec).

Ce tableau est un résumé des principales différences entre la présence d’un mandat de protection et l’absence d’un mandat de protection, mais il existe bien sûr d’autres différences, sans oublier qu’il est possible, dans un mandat de protection, de guider son mandataire à la personne dans sa prise de décisions quant à vos soins en confirmant son opposition ou non à tout acharnement thérapeutique ou diagnostic.

Il est également possible de prévoir une procuration avec son mandat de protection, ce qui peut notamment avoir une utilité lors de la procédure d’homologation du mandat de protection. Pour plus d’information à ce sujet, nous vous invitions à consulter le blogue intitulé « L’utilisation de la procuration d’une personne en perte d’autonomie » sur notre site Internet en utilisant le lien suivant : https://www.beauchampgilbert.com/fr/blogue/lutilisation-de-la-procuration-dune-personne-en-perte-dautonomie.

Afin de discuter plus en détail du mandat de protection et de vos besoins à ce sujet, nous vous invitions à nous joindre et un notaire chez BEAUCHAMP GILBERT NOTAIRES prendra le temps d’analyser ces aspects avec vous.

Me Kasandra Kutlesa, notaire

Commençons par une petite histoire. La sœur de Sophie décède dans un accident de voiture. Sophie découvre qu’elle est la bénéficiaire d’un REER que sa sœur détenait auprès d’une compagnie d’assurance. Sophie se questionne grandement quant à sa responsabilité pour le paiement des impôts suite au décaissement de ce REER. Elle se demande si, à titre de bénéficiaire, elle sera responsable du paiement de l’impôt ou si c’est la succession de sa sœur qui en sera responsable. Notre réponse à Sophie est assez simple ! En règle générale, le bénéficiaire désigné d’un REER ou d’un FERR recevra le REER ou le FERR, et ce libre d’impôt. Voici pourquoi.

En vertu des lois fiscales québécoises et fédérales[1], le défunt est réputé avoir disposé de ses actifs à sa juste valeur marchande, REER et FERR inclus, au moment du décès. Ainsi, la valeur du REER ou du FERR doit être incluse dans la déclaration fiscale de la défunte pour l’année de son décès. Par le fait même, la succession de la défunte sera responsable du paiement de la dette fiscale. Une telle interprétation des lois fiscales fut retenue dans plusieurs jugements[2], dont dans l’affaire Laforest c. Boudreault[3].

Dans cette affaire, le juge de première instance a établi que l’article 146 (8.8) a) de la Loi de l’impôt sur le revenu est clair. Il mentionne que la Loi « a pour effet de faire entrer le passif que constituent les impôts à payer dans le patrimoine du défunt puisqu’il est réputé avoir encaissé les REER le jour avant son décès. S’agissant d’un passif créé le jour précédant le décès, il est donc un passif de la succession[4].» Ainsi, la dette fiscale résultant de l’encaissement du REER ou du FERR n’est pas de la responsabilité du bénéficiaire du REER ou du FERR, mais bien de la succession de la défunte. Ce jugement fut porté en appel. En cette deuxième instance, les juges sont d’avis que le juge de première instance n'a commis aucune erreur en concluant que la succession était responsable du paiement de la dette d'impôt et que la responsabilité ultime de la dette fiscale n'est pas celle du bénéficiaire, mais bien de la succession[5].

Donc, la règle générale est que la responsabilité des impôts découlant du REER/FERR est celle de la succession de la défunte. Toutefois, il est important de noter qu’il existe des exceptions à ce principe (par exemple le cas d’une succession insolvable), d’où l’importance, lors de la rédaction d’un testament, de dresser une liste détaillée de vos avoirs pour que le notaire puisse en prendre connaissance et vous conseiller adéquatement. Si vous avez besoin d’aide avec la confection de votre testament ou si vous avez des questions dans le cadre de la liquidation d’une succession. Nous sommes là pour vous! Consultez-nous : info@beauchampgilbert.com. Un membre de notre équipe se fera un plaisir de communiquer avec vous.

 [1] Art. 146 (8.8) a) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.) et art. 915.2 Loi sur les impôts, RLRQ, c. I-3.

[2] Slater c. Klassen, 2000 DTC 6336; Curley v. MacDonald, 2000 CanLII 22836 (ON SC); Verville c. Industrielle-Alliance (L’), compagnie d’assurance sur la vie, J.E. 99-472 (QC C.S.).

[3] Laforest c. Boudreault, 2015 QCCA 162.

[4] Boudreault c. Laforest, 2013 QCCS 4575, para. 73-73.

[5] Ibid, note 3.

 

Me Joëlle Tremblay, notaire

Le décès, au même titre que le divorce, dissout l’union qui unissait deux personnes mariées. Eh oui, le décès est également un motif de dissolution du mariage ! Plusieurs conséquences peuvent découler du décès d’un conjoint marié et le testament peut être un outil fort important afin de planifier la dissolution de cette union. Dans un tel cadre de dissolution, la présence d’un contrat de mariage ou non viendra également « changer la donne » dans les calculs entourant le partage des biens des époux. Voyons ensemble comment cette dissolution se concrétisera pour le conjoint survivant.

Présence ou non d’un contrat de mariage ?  

Au Québec, peu importe le régime matrimonial choisi par des conjoints mariés, il y aura toujours deux composantes qui s’appliqueront à ces derniers à la dissolution de leur union, soit le patrimoine familial et ensuite le régime matrimonial. Ainsi, avant tout, lors du décès d’un défunt marié, il est important de vérifier si les époux avaient conclu un contrat de mariage devant un notaire. En effet, le régime matrimonial sera établi dans le contrat de mariage ou par la loi, si les conjoints n’ont pas signé de contrat de mariage.

Si un contrat de mariage a été signé, il établira le régime matrimonial des époux et le partage des biens se fera selon ce choix de régime. Si les époux n’ont pas signé de contrat de mariage, le partage des biens se fera selon le régime légal. Le régime qui s’appliquera sera normalement celui du lieu du domicile des époux au moment de leur union.

Patrimoine familial et régimes matrimoniaux

Le patrimoine familial est une mesure d’ordre public et tous les couples mariés ne peuvent s’en dissocier. C’est le régime primaire, et ses règles doivent être respectées, avant même de parler du régime matrimonial du couple.

Suivant le Code civil du Québec “Le patrimoine familial est constitué des biens suivants dont l’un ou l’autre des époux est propriétaire : les résidences de la famille ou les droits qui en confèrent l’usage, les meubles qui les garnissent ou les ornent et qui servent à l’usage du ménage, les véhicules automobiles utilisés pour les déplacements de la famille et les droits accumulés durant le mariage au titre d’un régime de retraite.”

Les autres biens des époux non inclus dans le patrimoine familial seront traités suivant le régime matrimonial des époux et au Québec, nous retrouvons principalement deux régimes matrimoniaux, soit la séparation de biens et la société d’acquêts, bien que d’autres régimes puissent aussi s’appliquer, par exemple la communauté de biens ou un régime matrimonial étranger.

Pour être mariés en séparation de biens, les conjoints doivent avoir signé un contrat de mariage devant un notaire. Suivant le régime de la séparation de biens, il n’y a aucun partage de biens, chaque époux conserve ses propres biens. Il faut alors seulement procéder au partage de la valeur des biens composant le patrimoine familial.

Si aucun contrat de mariage n’est signé par les époux, le régime matrimonial sera la société d’acquêts, en principe. Dans ce cas, il faudra faire deux partages, soit celui de la valeur des biens inclus dans le patrimoine familial et celui de la valeur des biens inclus dans la société d’acquêts, laquelle consiste aux biens non inclus dans le patrimoine familial.

Dans le cas du décès d’un conjoint marié, vous l’aurez deviné, c’est le conjoint survivant et la succession du conjoint décédé qui devront procéder à ce(s) partage(s). Ce(s) partage(s) permettra(ont) de déterminer lequel du conjoint survivant ou de la succession devra verser une somme à l’autre pour rétablir le déséquilibre monétaire entre les deux.

Succession testamentaire VS succession ab intestat

Il faut faire la différence entre une succession testamentaire, soit une personne qui décède avec un testament, et une succession ab intestat, soit une personne qui décède sans testament. Au Canada, plus de 50 % de la population n’a pas signé de testament. 50 %, c’est énorme ! Mais quel est l’avantage de faire un testament si nous sommes mariés ? Contrairement aux croyances populaires, au Québec, même si une personne est mariée, son conjoint n’héritera pas seul si aucune disposition testamentaire ne prévoit ce scénario. Dépendamment de la situation familiale du défunt, le conjoint marié héritera avec les enfants du défunt ou à défaut d’enfants, avec les parents et frères et sœurs du défunt.

Pour éviter que votre conjoint n’hérite pas seul, il est possible de prévoir dans votre testament que votre conjoint sera l'unique héritier de votre succession. De cette façon, votre conjoint héritera seul de vos biens et ne devra pas payer une somme à votre succession pour le partage du patrimoine familial et du régime matrimonial, sauf quelques exceptions, notamment si la succession est insolvable. Dans ce dernier cas malheureux, il se pourrait que l’époux survivant se voit contraint de payer une somme à la succession suite au partage de la valeur des biens du patrimoine familial et du régime matrimonial, puisque les créanciers du défunt sont en droit de recevoir ces sommes qui serviront au paiement des dettes de celui-ci.

Nous en profitons pour faire un petit rappel important sur les conjoints de fait : en l’absence de dispositions testamentaires désignant le conjoint de fait comme héritier, ce dernier ne sera pas héritier de votre succession, même si vous êtes ensemble depuis des dizaines d’années. 

Nous ne le répéterons jamais assez que le testament est le seul outil qui vous assure du choix de vos héritiers !

Régime enregistré d'épargne-retraite (ci-après “REER”) VS legs à un conjoint

L'un des avantages de léguer son REER à son conjoint est qu’il sera possible de reporter l’impact fiscal lié à ce legs à un moment ultérieur. Normalement, l’entièreté des REER d’un défunt doit être imposée suivant son taux d’imposition à la date de son décès. Lorsque la personne qui reçoit les REER du défunt se qualifie de conjoint au sens fiscal, il est possible de se prévaloir d’un avantage fiscal suivant lequel cette imposition sera reportée à des moments ultérieurs, comme au décaissement des REER par le conjoint survivant ou à son propre décès.

Pour se prévaloir d’un tel transfert, il peut être exigé de produire certains documents dans un délai spécifique. Malgré qu’un conjoint de fait peut se qualifier pour un tel transfert, certaines exigences devront être respectées. Pour de plus amples renseignements, il est fortement conseillé de consulter son fiscaliste pour connaître toutes les composantes et exigences afin que ce transfert puisse avoir lieu avec le moins d’impact fiscal.

Obligation alimentaire

L’article 684 du Code civil du Québec prévoit que le conjoint survivant d’un défunt marié, créancier d’aliments (par exemple, qui reçoit une pension alimentaire), peut réclamer une obligation alimentaire à la succession de ce défunt. C’est la loi qui prévoit comment sera calculée cette somme et comment elle sera payée. Encore une fois, il faut faire preuve d’une grande vigilance puisque la réclamation au liquidateur de la succession pour obtenir cette somme doit être faite dans les 6 mois du décès du conjoint.

Conclusion

Comme vous pouvez le constater, ce n’est pas parce que vous êtes marié que votre liquidation de succession sera plus simple. Notre plus grande recommandation : consultez un notaire avant de faire votre testament. Le notaire vous conseillera adéquatement sur la façon de léguer vos biens avec le moins d’impact négatif possible.

Venez à notre rencontre, nos notaires connaissent bien le domaine des successions, ils pourront vous conseiller avant ou après un décès : info@beauchampgilbert.com

 

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